Il était à cran, Julian. Depuis qu'il s'était levé, il courait dans tous les sens. Le procès approchait, et il n'était pas prêt. Ca ne lui arrivait pas souvent d'être dépassé par les évènements, lui qui aimait tout contrôler. Depuis qu'il avait ouvert son cabinet, il prenait encore plus ses affaires à cœur, car il s'agissait de sa réputation avant tout. Dans le milieu du droit, il le savait mieux que quiconque, des carrières se font et se défont. Il ne pouvait pas se le permettre. Son boulot c'était tout ce qu'il avait depuis qu'elle était partie. Il secouait la tête de gauche à droite chassant ces pensées de son esprit. Il ne parlait plus d'elle, même juste penser à elle était une épreuve. Un soupir traversait ses lèvres alors que sa secrétaire lui répétait encore et encore qu'ils n'avaient pas eu assez de temps pour clôturer le dossier et qu'ils faisaient tout leur possible pour le finir à temps. Les yeux levés au ciel, il tournait les talons avec dans l'idée d'aller se chercher un café de l'autre côté de la rue. Il avait besoin de prendre l'air sinon il finirait par foutre le feu à ce cabinet. Il prenait une grand bouffée d'air frais en sortant avant de caler son dossier sous son bras. Son esprit était tellement occupé et ses pas si pressés, qu'il n'avait pas vu la jeune femme arriver en face de lui. Il soupirait à nouveau en regardant les feuilles de son dossier s'envoler. Il n'avait même pas la force de hausser la voix sur elle pour lui être rentrée dedans. “Manquait plus que ça...” soufflait-il entre ses dents. Puis la jeune femme s'excusait, et sa voix le fit frissonner. La fatigue sûrement, il commençait à halluciner maintenant. Mais lorsqu'il relevait les yeux sur elle, c'était bien elle qui se trouvait devant lui, l'air désolé. "Phoebe?" En deux ans, il n'avait jamais croisé ce regard espiègle et il fallait qu'ils se croisent aujourd'hui. Un léger rire ironique traversait ses lèvres. "Décidément, c'est ma journée..." Il s'était même dit qu'elle avait du partir, lever les voiles, histoire d'être loin de lui. Il se contentait de ramasser les quelques feuilles qui traînaient sans la regarder, il n'osait pas. Les mots restaient coincés dans sa gorge, en se levant ce matin il n'avait pas pensé que le passé pouvait lui revenir en plein visage de la sorte. La douleur était encore vive, même si le temps était passé, même s'il avait retrouvé quelqu'un. Une fois qu'on a aimé, on aime toujours, lui disait sa mère. Il prenait un malin plaisir à lui dire que c'était des conneries lorsqu'il avait quinze ans, mais le presque quarantenaire qu'il était aujourd'hui commençait à comprendre le sens de ces mots. Une fois tous ces papiers ramassés, il se relevait et posait un regard fuyant sur elle. Il toussotait, passait une main dans lasse dans ses cheveux avant de reprendre un air sérieux. “Tu as fait exprès, avoue-le.” Ton taquin ou ton de reproche, même lui n'en était pas sûr. Il arrangeait sa cravate, quelque peu nerveusement, avant d'ajouter. “Tu as l'air pressée, alors...” Il n'en savait rien en soit, lui-même était pressé, mais il ne savait pas sur quel pied danser, Julian. Il n'arrivait pas à savoir s'il devait être heureux de la revoir ou s'il devait s'enfuir tant qu'il en avait l'occasion. Elle était celle qui était partie, après tout. Rien n'avait du changer en deux ans. Sa tête lui criait de retourner à son bureau sans même prendre de café, alors que son cœur lui disait de trouver une excuse pour rester. Mais son ego ne cessait de lui rappeler qu'elle l'avait laissé, il lui en voulait, pourtant, bordel, quand il la regardait, elle était toujours aussi belle.