-  Three things cannot be long hidden : the sun, the moon, the truth. (Jason) -

Three things cannot be long hidden :
the sun, the moon, the truth.
Jason Lang & Aymeric Lang

Aymeric relisait le contrat de travail qu'il avait sous les yeux pour la quatrième fois. Il avait été chargé de trouver un vice de forme afin qu'un stupide héritier puisse licencier tranquillement l'un de ses employés. Apparemment il couchait avec la femme de ce dernier et souhaitait ne pas être dérangé par le mari lors de ses ébats. Une tâche assez simple en soi et pourtant le jeune homme n'arrivait pas à se concentrer, les mots qu'il était en train de lire et qui lui étaient si familiers n'avaient aucun sens. Son esprit était préoccupé et ça ne lui ressemblait pas. Le problème était que depuis quelques temps, certaines rumeurs parvenaient à ses oreilles. Des rumeurs qui concernaient sa famille et plus particulièrement Jason, son grand frère, le modèle parfait des Lang. Les gens parlent, ils parlent beaucoup. Ils disent des bêtises des fois. Le problème c'est qu'à force d'entendre ces bêtises à répétition, on commence à douter de leurs véracités et c'était le cas d'Aymeric en ce moment. Et si toutes ces rumeurs étaient fondées ? Non, c'était impossible ! C'était quand même bizarre qu'exactement la même histoire était revenue à plusieurs reprises de sources différentes. Il n'en pouvait plus, il devait absolument en avoir le cœur net pour voir ce qu'il allait bien pouvoir faire de cette information. Il sortit son téléphone de sa poche et commença à pianoter un texto à destination de son frère :

« Coucou grand frère comment ça va ? Ça te tente d’aller boire un verre ce soir ? De toute façon tu n’as pas le choix, tu ne peux rien refuser à ton petit frère adoré. Rendez-vous au MacKenzie ce soir après le travail. A tout à l’heure ! »

Il rangea ensuite son téléphone et replongea tête baissée dans son contrat. Le reste de la journée se déroula assez tranquillement. Après des longues heures de relecture, il avait fini par trouver une coquille dans le contrat qui permettait à l'amant de licencier son employé en toute impunité. Après avoir donné son compte rendu à son supérieur, il attrapa ses affaires et partit en direction de Balboa Peninsula. Il avait grand besoin de décompresser et ce petit verre improvisé tombait finalement à pic.

Après avoir passé quelques minutes dans les embouteillages, à insulter quelques personnes au passage, Aymeric arriva enfin au MacKenzie. Il scruta rapidement la salle pour voir s'il pouvait trouver son frère. Pas de Jason en vue, tant pis il allait faire l'effort de l'attendre. C'est vrai qu'il n'avait pas pris la peine de préciser une heure de son sms. Il n'avait d'ailleurs même pas vérifier son téléphone pour voir si son frère lui avait répondu ou non. De toute manière sa famille ne lui refusait jamais rien, ils savaient à quoi s'attendre sinon. Il s'installa à une table au fond du bar, histoire d'être à peu près tranquille et de pouvoir avoir une bonne discussion avec son frère, commanda une bière et patienta.

Travailler au musée avait été au départ un job qu’il avait pris parce qu’il voulait pouvoir montrer aux autres ce qu’est l’art. Devenir guide avait été quelque chose dont il avait été particulier heureux. Puis, il avait grimpé les échelons et voilà qu’il en était devenu le directeur depuis dix ans. Alors, évidemment ça demandait beaucoup de temps et d’efforts, mais il aimait vraiment ce qu’il faisait. Malgré les artistes parfois farfelus, les personnes qui tentaient de passer par le conseil d’administration pour voir leurs œuvres exposées ou encore les personnes parfois très mal élevées qui ne savaient pas ce qu’était une poubelle et laissaient leurs bouteilles près d’un banc. Heureusement, il y avait des gens civilisés et Jason devait avouer que ça faisait du bien. Tout comme d’avoir du personnel respectueux et qui semblait vraiment aimer leurs postes. Jay savait qu’il pouvait parfois être un peu trop direct avec eux, mais il voulait que tout le monde se sente bien et c’était aussi pour ça qu’il acceptait de leur laisser faire des stages et autres formations pour pouvoir se diversifier au sein du musée. D’ailleurs, il était en train de lire trois demandes de formation quand il entendit son portable sonner. En regardant l’écran, il vit le nom de son plus jeune frère écrit dessus. Lisant le message, il en fut à la fois surpris et content.

J’y serais sans faute.

En même temps, il n’avait visiblement pas le choix. C’était cette partie-là de son frère qu’il trouvait parfois irritant. Ce dernier se prenait pour le centre du monde et il jouait les victimes auprès de leurs parents. Mais, il savait que Aymeric était un jeune homme avec un bon fond. En plus, c’était son frère donc il ne pouvait pas non plus lui tourner le dos. Reposant son téléphone, il continua donc de lire la paperasse, avant d’accorder les formations aux trois employés qui les avaient demandées. Allant d’ailleurs en parler avec ces derniers, il fit en sorte de faire coller les dates pour qu’il y ait assez de monde pour l’aider au sein du musée pendant que les autres seraient en formation. Puis, il continua sa journée tranquillement, à remplir et signer des papiers, tout en allant vérifier que les banderoles étaient enfin bien misent en place pour la prochaine exposition. Le soir venu, il rentra chez lui rapidement et prévint son compagnon qu’il allait en ville pour voir Aymeric. Un bisou aux jumeaux et Jay se rendit donc au MacKenzie. Une fois sur place, il y entra et chercha son frère du regard, avant de le voir à une table au fond. Passant au bar se prendre une bière, il alla ensuite rejoindre le plus jeune.

Me voilà. Comment vas-tu ?

Posant sa bière sur la table, il enleva sa veste et la pose sur ses genoux après s’être installé. C’est vrai qu’il ne l’avait pas vu depuis un moment, peut-être avait-il quelque chose à lui demander.

Three things cannot be long hidden :
the sun, the moon, the truth.
Jason Lang & Aymeric Lang

Il ne fallut que quelques minutes pour que Jason pointe le bout de son nez une bière à la main. Quelle idée de prendre sa bière au bar, c’était tellement plus agréable de se faire servir. A croire que le reste de sa famille n’avait jamais su apprécier les avantages qu’il y avait à être un Lang, trop occupés à essayer de prouver qu’ils pouvaient être quelqu’un sans l’aide de papa et maman. Les relations entre Jason et Aymeric étaient assez spéciales : ils n’avaient pas vraiment grandis ensemble, Jason avait pris son indépendance lorsqu’Aymeric n’était encore qu’un bambin et Aymeric semblait avoir un certain don pour agacer son grand frère adoré. Disons qu’il savait exactement quoi dire pour le titiller un peu. Les deux avaient des profils plutôt différents : Aymeric était le petit jeune fougueux prêt à conquérir le monde et Jason était le grand frère plus sage à la vie plus posée. Du moins c’est l’illusion qu’il donnait

« Enfin, un peu plus et j’attendais, ça aurait bien été la première fois ! Oh moi ça va plutôt pas mal. C’est plutôt à toi qu’on devrait poser la question, j’ai entendu dire que tu étais un homme très occupé ces derniers temps. »

C'est vrai qu'entre son travail au musée, sa femme, ses enfants et ses mensonges, Jason ne devait plus avoir beaucoup de temps pour lui. Le pauvre. Heureusement d'ici quelques minutes Aymeric allait le soulager de l'une de ces responsabilités. Enfin s'il mentait vraiment. Oui, car après tout, peut-être que Jason était en réalité honnête et que toutes les rumeurs qu'il avait entendues n'étaient que des ragots. Enfin, honnête et Lang sont deux mots que l'on associe que rarement ensemble. Il prit une gorgée de sa bière affichant un grand sourire. Il devait être intelligent, ne pas tout gâcher. Lâcher la bombe d'un coup ne ferait que faire fuir son frère. Non, il devait glisser des petits indices de-ci de-là, histoire de jauger sa réaction et d'arriver lentement au climax.

« Des petits oiseaux m'ont rapporté que depuis quelques temps tu t'étais lancé dans la philanthropie, à aider les minorités de Newport Beach. C'est tellement généreux de ta part. Heureusement que tu as choisi la cause homosexuelle et non les Mexicains, ça aurait achevé Papa et Maman. Quoique, je suis pas certain que cette cause les enchante beaucoup non plus. Je crois qu'ils préfèrent faire des dons aux écoles de police. C'est plus dans l'esprit de la famille. »

Les parents Lang étaient plutôt du genre conservateur et avaient très certainement voté pour Trump lors des dernières élections. Etait-ce si étonnant ? La question maintenant était de savoir s’ils étaient plus racistes qu’homophobes. Aymeric ne se souciait guère de ce genre de détails : les gens pouvaient être qui ils voulaient et coucher avec qui ils voulaient, tant qu’ils ne faisaient pas obstacle à sa réussite. Et puis vu sa sexualité débridée il était pour le moment mal placé pour juger. Il observait attentivement son frère histoire de pouvoir analyser avec détail sa réaction. Il commençait doucement, histoire de tâter le terrain, mais cela devrait déjà être suffisant pour commencer à mettre mal à l’aise Jason.

Oh, il aurait pû se laisser servir, mais là au moins il avait déjà sa boisson avec lui. Mais, il savait que son frère était de ce genre-là. Il l’avait été quand il était petit, mais avec le temps il avait changé et puis il aimait bien pouvoir avoir quelque chose à la main. Ca aidait aussi parfois quand il était nerveux. Enfin bref, il se retrouva finalement à la table de son frère et le salua, prenant en même temps de ses nouvelles. Aux paroles de ce dernier, Jason leva les yeux au ciel. Parfois, il décrivait son frère comme étant une drama queen. Ca le faisait rire d’ailleurs, mais il préféra ne pas le lui dire. A la place, il but un peu de sa bière et hocha la tête à ses propos.

C’est vrai. On a une nouvelle exposition qui arrive et il faut tout mettre en place. Comme à chaque fois ça fait pas mal de boulot.

Mais c’était plaisant. D’ailleurs, il aimait être sous pression dans son travail. Ca l’aidait à être meilleur. En tout cas, c’était ce qu’il ressentait. Cependant, il était loin d’imaginer que c’était d’un tout autre sujet que parlait Aymeric. Après tout, il ne savait pas que ce dernier avait entendu de telles rumeurs et il devait avouer qu’il était content que seules quelques personnes soient au courant. Avec des parents comme les leurs, disons que c’était une vérité qui allait lui apporter de gros problèmes. Attentif à ce que disait Aymeric, le directeur de musée, fronça les sourcils.

Je …

De quoi parlait-il ? Haussant un sourcil, Jason décida donc de répondre le plus naturellement du monde.

C’est vrai que vu mon salaire et l’argent que j’ai à la banque, je peux me permettre de faire des dons. Je sais que papa et maman ne sont clairement pas agréables sur un tas de sujets, mais tu sais aussi bien que moi que certaines causes valent plus que d’autres. Mais serait-ce un message de ta part, pour me dire d’aider les mexicains ?

Oui, là-dessus il était un peu perdu, il devait l’avouer.

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the sun, the moon, the truth.
Jason Lang & Aymeric Lang

« Une nouvelle exposition. C’est cool. Je suis invité à l’inauguration j’espère ! »

Non qu’il avait quelque chose à faire de l’art. Il n’y comprenait rien et n’avait pas vraiment envie de comprendre. Mais toute occasion de boire et manger en se vantant auprès des gens influents de la ville était bonne à prendre. Ils ne s’attardèrent pas trop ce sujet, il n’était pas passionnant de toute manière.

« Si tu as trop d’argent tu sais que tu peux toujours faire plaisir à ton petit frère adoré ! »

Bah quoi ? Ce n’est pas parce qu’il était en mission pour déceler le vrai du faux qu’il n’avait pas le droit de gratter un peu. Il adorait ça les cadeaux, ça fait toujours plaisir. Mais effectivement, là n’était pas la question principale de ce petit tête-à-tête. Son frère ne niait donc pas, il effectuait bel et bien des dons aux associations LGBT de la ville. Mais pourquoi ce soudain intérêt pour la cause homosexuelle. C’est vrai, il ne l’avait jamais entendu jusqu’à aujourd’hui parler de ce sujet. Peut-être qu’il ne l’écoutait pas assez, il avait souvent tendance à faire semblant d’écouter les autres lorsque le sujet de la conversation ne l’intéressait pas. Et puis, il avait toujours pensé qu’avec le balai qu’il avait dans les fesses, l’homosexualité était quelque chose qui le gênait voir le dégoûtait. Alors pourquoi ce soudain changement de situation ?

«  Certaines causes valent plus que d’autres ? Je ne savais pas qu’il y avait une hiérarchie des gens qui avaient besoin de plus d’aides que les autres. Oh non, pas la peine de les aider ceux-là. Laisse les de leur côté de la frontière avec toutes leurs maladies »

Laisser un Mexicain entrer en Californie c’était un coup à chopper la tuberculose ou pire encore. Qu’ils restent chez eux. Mais encore une fois il s’égarait, on n’en avait rien à faire des Mexicains, laissons Trump s’occuper d’eux. Il devait recentrer le débat sur ce qui l’intéressait réellement ici. Pour le moment les réactions de Jason étaient assez décevantes. Certes il avait commencé à bégayer, mais ce n’était pas suffisant pour savoir s’il était vraiment le traître qu’Aymeric pensait. Il devait donc attaquer un peu plus. Et il savait parfaitement quel sujet aborder pour pouvoir récolter plus d’indices sur l’honnêteté de son frère aîné.

« Du coup ces mêmes petits oiseaux m’ont aussi appris que tu traînais pas mal avec Thomas. Enfin… je ne sais pas trop comment il … enfin elle… se fait appeler maintenant. Je n’ai pas trop suivi son histoire, j’en ai pas grand-chose à faire pour être honnête. Mais je pense que tu devrais faire plus attention. Tu sais les gens ont vite tendance à parler. Je doute que tu ais très envie d’entacher ton image de mari idéal et père parfait. Ce serait dommage. »

Il reprit une nouvelle gorgée de sa bière en maintenant son regard fixe sur son frère. Il affichait volontairement un regard provocateur histoire de bien lui montrer qu’il ne balançait pas là des petites phrases bien innocentes mais qu’il y avait bel et bien un but à toute cette conversation.

Oui, comme tous les gens de la ville qui achèteront un billet d’entrée.

Souriant face à cela, il savait que son fils risquait de tiquer sur le fait qu’il n’aurait pas de place gratuite. Mais Jason était comme ça. Il aimait l’ennuyer et parfois lui faire débourser son argent même s’il ne le voulait pas. Quoi que Aymeric serait du genre à ne pas venir si ça n’était pas gratuit. Enfin, il verrait bien le jour J. Seulement, la suite de la conversation le laissa un peu perplexe. De quoi parlait-il exactement ? Secouant la tête en levant les yeux au ciel aux propos du plus jeune, Jason grogna.

Tu en as bien assez avec papa et maman.

Lui aussi en avait bien sûr, mais il ne l’utilisait pas. En tout cas, il utilisait son propre argent d’abord, celui qu’il gagnait honnêtement. Mais, ça n’était pas le sujet. En général, ça finissait par une prise de tête. Donc, Jason ne voulait pas en arriver là. Parlant du fait qu’en effet il aidait la communauté LGBT, Jay ne voyait toujours pas où son frère voulait en venir. Il se demandait même si en faisant référence aux mexicains, Aymeric voulait lui dire qu’il avait un ami dans le besoin. Donc, très loin du sujet que voulait aborder son frère. Soupirant, totalement déçu par de telles paroles de la part du plus jeune, il se demandait parfois comment ce dernier pouvait-il dire de telles choses. Mais, il ne comptait pas parler politique.

Oui, certaines causes valent pas plus que d’autres, quand elles ont besoin de plus d’aide pour pouvoir se faire entendre.

C’était en tout cas ainsi que lui voyait les choses. En l’entendant de parler de petits oiseaux, Jay fronça les sourcils tout en buvant un peu de sa bière. Aymeric semblait avoir donc des yeux et des oreilles partout. Pas forcément une bonne chose aux yeux du plus âgé. En parlant de Thomas devenu Reanna, le brun fut assez surpris. Voilà une personne dont il n’avait pas parlé avec Aymeric depuis bien longtemps.

Elle s’appelle désormais Reanna et mérite ton respect.

Son parcours avait en effet été particulièrement difficile, en particulier à cause de ses parents. Les Bancroft n’étaient vraiment pas des gens bien. Seulement, ce que son frère lui disait, le faisait bouillir. Comment osait-il ?

En quoi ça te concerne exactement ? Mon image de mari et père n’a pas à être important pour toi. De toute façon, je ne suis pas un mari idéal ou un père parfait. Je suis un type qui a une famille qu’il aime.

Oui, il tentait de ne pas trop en dire, c’était une pente glissante, mais entendre son frère dire de telles choses le mettait hors de lui.

Donc tu penses que parce que je donne de mon argent à la communauté LGBT et que je suis proche d’un trans-genre, on va penser que j’en suis un aussi ?